Transcription Transcription des fichiers de la notice - <em>Mythologie</em>, Paris, 1627 - VII, 01 : Que les hommes illustres ont acquis de la gloire avecque raison, pour avoir obligé le public Conti, Natale 1627 chargé d'édition/chercheur Équipe Mythologia Projet Mythologia (CRIMEL, URCA ; IUF) ; projet EMAN, Thalim (CNRS-ENS-Sorbonne Nouvelle) PARIS
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1627 Fiche : Projet Mythologia (CRIMEL, URCA ; IUF) ; projet EMAN, Thalim (CNRS-ENS-Sorbonne Nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l’Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
Paris (France), BnF, NUMM-117380 - J-1943 (1-2)
Français

MYTHOLOGIE ov EXPLICATION DES FABLES.

LIVRE SEPTIESME.

SOMMAIRE DES CHAPITRES.

I. Que les hommes Illuſtres ont acquis de la gloire auecque raiſon, pour auoir obligé le public. II. De Hercule. III. D’Acheloüs. IV. Du Sanglier de Calydon. V. Des Centaures. VI. De Cygne. VII. Des Harpyes. VIII. Des Heſperides IX. D’Atalante. X. De Theſee. XI. De Teree. XII. De Meduſe. XIII. Des Gorgones. XIV. Des Serenes. XV. D’Orphee. XVI. Des Muſes. XVII. De Dedale. XVIII. De Pelops. XIX. De Perſee.

Que les hommes Illuſtres ont acquis de la gloire auecque raiſon, pour auoir obligé le public.

CHAPITRE PREMIER.

CERTES il n’y a point de plus ſaincte loy, ny de plus belle ordonnance, que celle qui recompenſe dignement les vertus des braues hommes, & punit les delinquans ; car c’eſt vne choſe equitable, que non ſeulement les hommes ſoient empeſchez de mal-faire, mais auſſi incitez à ſuiure la vertu, & s’appliquer à de valeureux actes ; afin qu’ils ne paſſent cette vie en oyſiueté & nonchalance. C’eſt cette seule conſideration par laquelle Hercule & les autres Preux tant renommez furent induits à courageuſement entreprendre beaucoup de trauaux, de hazards & de braues exploits de façon qu’ils n’ont rien trouué, ne ſi horrible, ne ſi mal-aiſé, que par trauail, & patience il n’ayent ſurmonté. Car ce qu’ils ont purgé le monde de tant de voleurs, qu’ils ſont deſcendus aux Enfers, qu’ils ont combatu & dompté d’horribles monſtres, qu’ils ont rembarré, voire eſteint la cruauté de pluſieurs tyrans, ç’ont eſté les recompenſes & ſalaires de leur vertu. Or le plus excellent loyer qu’ait la vertu, c’eſt la gloire, qui a de merueilleux aiguillons pour accourager les affections des hommes à de belles & valeureuſes entrepriſes ; & leur faire trouuer legeres, vnies & faciles les plus faſcheuſes, raboteuſes & difficiles choſes du monde. Auſſi nulle ville, ny nation, ny eſtat ne pourroit eſtre fleuriſſante ny de duree, s’il ſe contentoit ſeulement de chaſtier les mal-faicteurs, ſans auoir aucun eſgard au merite des gens de bien, joint que cette ville ſeule peut eſtre heureuſe, qui ſçait deferer aux bons & gens d’honneur ſes dignitez & charges de iudicature. Celle qui le ſçaura bien faire, ſera d’autant plus noble & plus fleuriſſante, qu’elle ſera ſoigneuſe de s’en bien & deuëment acquitter. Nous auons vne ſuffiſante preuue de ce que ie viens de dire en l’Empire Romain, qui ſouuentefois a eſté commis à la ſuffiſance de gens de bien, quoy qu’eſtrangers. Les Atheniens auſſi ont bien ſouuent donné la ſouueraineté de leur Republique à des Forains, eu eſgard à leur valeur & preud’hommie. Au contraire, la ville qui n’ouure les portes, & ne tend les bras qu’à ceux là ſeulement qui ſont nez & nourris chez elle ; qui les ferme pour tout iamais à la vertu & vaillance des eſtrangers, qui ſans faire eſtat de la preud’hommie des perſonnes, meſmement entre ſes citadins, appelle aux offices & eſtats publics bons & mauuais indifferemment : qui propoſe bien des punitions pour les crimes, mais point de salaire pour la vertu : ou qui meſme ſe penſe eſtre bien acquittee de ſon deuoir, eſtabliſſant quelques legeres peines aux meſchans : comment ne la qualifiera-on laſche, nonchalante & libidineuſe ? comment eſt-ce que quand de folles, voire mauuaiſes perſonnes, manieront ſon Eſtat ne ſe tournera-elle en vne inſupportable tyrannie ? comment ne ſera-elle oublieuſe voire ingratte des biens, plaiſirs & ſeruices qu’on luy aura faits ?cõment s’empeſchera-elle de vieillir & croupir au milieu d’vn bordeau ? Car l’eſprit de l’homme ne peut eſtre oiſif ny inutile, s’il ne s’applique à d’honneſtes exercices, il faut neceſſairement qu’il s’addonne à toutes ſales & indignes occupations, & ſi l’on ferme la porte aux vertus, on l’ouure par conſequent aux vices & meſchancetez, puis qu’ainſi eſt qu’il faut neceſſairement s’exercer à quelque choſe.