Transcription Transcription des fichiers de la notice - <em>Mythologie</em>, Paris, 1627 - VIII, 01 : Comme quoy la multitude des Dieux des Anciens se peut sagement rapporter à un seul Dieu Conti, Natale 1627 chargé d'édition/chercheur Équipe Mythologia Projet Mythologia (CRIMEL, URCA ; IUF) ; projet EMAN, Thalim (CNRS-ENS-Sorbonne Nouvelle) PARIS
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1627 Fiche : Projet Mythologia (CRIMEL, URCA ; IUF) ; projet EMAN, Thalim (CNRS-ENS-Sorbonne Nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l’Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
Paris (France), BnF, NUMM-117380 - J-1943 (1-2)
Français

MYTHOLOGIE,

ov,

EXPLICATION

DES FABLES.

LIVRE HVICTIESME.

SOMMAIRE DES CHAPITRES.

I. Comme quoy la multitude des Dieux des Anciens ſe peut ſagement rapporter à vn ſeul Dieu. II. De l’Ocean. III. De Tethys & Thetis. IV. De Triton. V. D’Inon & de Palemon, autrement de Melicerte. VI. De Glauque. VII. De Neree & des Nereides. VIII. De Phorcys. IX. De Prothee. X. De Caſtor & Pollux. XI. D’Eole. XII. De la Bize, ou de Boree. XIII. De Scylle. XIV. D’Orion. XV. D’Arion. XVI. D’Amphion. XVII. Des Halcyons. XVIII. D’Aſope. XIX. De Deucalion. XX. D’Ion, ou d’Iſis. XXI. De Veſta. XXII. D’Iris. XXIII. D’Alphee. XXIV. D’Inache. XXV. D’Europe. XXVI. De Penelope. XXVII. D’Andromede.

Comme quoy la multitude des Dieux des Anciens ſe peut ſagement rapporter à vn ſeul Dieu.

CHAPITRE PREMIER.

Diuinité generalement auoüee des Anciens.CERTES nos Anceſtres, qui ont les premiers introduit entre les hommes la Religion & la crainte des Dieux, ont eſté doüez d’vne admirable voire preſque diuine ſageſſe : non ſeulement pource que nulle cité, nulle compagnie ou aſſemblee d’hommes, nul meſnage ne peut longuement conſiſter ſans Religion ; mais auſſi d’autant que par telle ſi diuerſe varieté de Fables ils ont montré qu’il n’y a coin ny place aucune au monde, où la Majeſté diuine ne ſoit preſente. Car encores qu’ils n’ayent participé à la pureté de la religion Chreſtienne, d’autant que ceſte grande & incomparable lumiere de verité, Ieſus-Chriſt, n’auoit encores eſpandu par l’Vniuers les preceptes de la vraye Religion : ſi eſt-ce que de toutes leurs puiſſances, & tant qu’ils ont peu eſtendre les forces de leur entendement, ils s’efforçoient de montrer que perſonne ne peut ſecrettement entreprendre aucun acte, ſoit deſhonneſte, ſoit honnorable ; que Dieu ne vienne quand & quand à le deſcouurir. Auſſi prouuoient-ils que les Dieux auoient ſoing des affaires de ce monde, veu qu’ils leur auoient eſtably & ordonné des ceremonies, des ſeruices, des prieres, & vne maniere de les ſeruir & adorer chacun en particulier, ou pour appaiſer leur ire, ou pour obtenir quelque demande d’eux. Car l’intention de ceux qui controuuerent tant de Fables, eſtoit de faire connoiſtre que Dieu void & oyt toutes choſes : leſquels i’eſtime auoir eſté beaucoup plus ſages que Pythagoras ou Socrates, ou tous ces autres qu’on a depuis nommez Philoſophes. Et combien que cette religion Payenne fuſt bien eſloignee de perfection, & ne fuſt ſuffiſante pour bien inſtruire les hommes en la connoiſſance de Dieu, toutefois il ne leur faut pas tourner cela en blaſme, d’autant que rien ne peut naiſtre parfaict & accomply de tous poincts. Ainſi doncques pour donner à entendre qu’aucun endroit, aucune place du monde ny priuee ny publique ne peut eſtre vuide de la preſence de Dieu, afin qu’aucun meſchant ne penſaſt ſe pouuoir cacher de luy, ils ont introduit des Dieux pour les nauigeans, pour les laboureurs, pour les gens de guerre, pour les paſtres, pour les chaſſeurs ; en ſomme pour toutes vacations & qualitez de perſonnes : pource que le commun peuple ne pouuoit comprendre comment il ſe peut faire que n’eſtant qu’vn ſeul Dieu il peuſt voir en vn meſme temps ce qui ſe fait par tout le monde, & ouyr les propos qui ſe tiennent entre vne ſi grande, voire preſque infinie multitude de gens qui ſont en cet Vniuers. Car la populace meſure ordinairement la nature diuine ſelon la capacité de ſon entendement : & reiette & tient pour faux ce qui luy ſemble par trop admirable, combien qu’il ne ſoit point indigne de la nature diuine ; pource que reſſemblant à vn eſtomach deſuoyé, elle ne peut receuoir ny digerer de plus ſolides ny plus robuſtes viandes. Ie croy que c’eſt ce qui a faict introduire aux Anciens vne ſi grande pluralité de Dieux, voulans enſeigner que Dieu eſt par tout, & que tout ſe paſſe ſuiuant ſon bon plaiſir & prouidence. Dieu ſurnommé diuerſement ſelon ſes diuers effects.Et parce que ſes effects, ſont diuers, auſſi luy ont-ils donné diuers noms. Iupiter.Car ils ont appellé Iupiter pere des Dieux, cette Vertu diuine qui conduit & gouuerne le Ciel & toutes les parties du monde : cette puiſſance qui agit iuſques ſous terre, ils l’ont nommee Pluton, & frere de Iupiter. Et pource que cet eſprit diuin s’eſpand auſſi ſur les eaux, qu’ils ont tresbien cogneu n’eſtre deſpourueuës de ſa prouidence, Neptun.ils l’ont appellé Neptun, frere ſemblablement de Iupiter : Iunon.ainſi qu’ils ont nommé Iunon ſœur de Iupiter cette force diuine qui ſe proumene emmi l’air & le diſpoſe ſelon ſa volonté. En ſomme ils ont eſtimé que toutes les facultez eſpanduës par chaſque Element tiroient leur ſource & dependoient de plus hault qu’elles ; toutes leſquelles ils ont extraites comme d’vne fontaine, & les ont eſparſes en pluſieurs ruiſſeaux, expliquans la nature de chaſcune d’icelles. En vn mot ſi nous voulons diligemment examiner le faict, nous trouuerons que preſque tous les Dieux payens ſont ou freres de Iupiter, ou fils, ou petits-fils, ou conioints par quelque alliance. De ce diſcours il appert que les anciens n’ont voulu enſeigner autre choſe, ſinon qu’il n’y a qu’vn Dieu, vn ſeul & ſouuerain gouuerneur de tout l’Vniuers, la puiſſance duquel s’eſpãd par-tout ; qui ſeul void tout, oit tout, regit tout. Or entrons maintenant en la conſideration de ce que nous auons deliberé de traitter : & premierement de l’Ocean.