Archives Marguerite Audoux

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Lettre d'Alice Mirbeau à Marguerite Audoux

Auteur(s) : Mirbeau, Alice

Description
  • « André Baillon (Anvers, 1875 ‑ Saint-Germain-en-Laye, 1932), écrivain belge de langue française, a signé quelques-uns des plus beaux livres de l'entre-deux-guerres: En sabots, Histoire d'une Marie, Un homme si simple, Délires, Le perce-oreille du Luxembourg... Chefs-d'œuvre de style, d'ironie et de sensibilité, ils composent la poignante confession d'un solitaire écorché, cerné par le désespoir et la folie, mais sauvé par l'obsédante passion d'écrire et par un humour libérateur. Si certains de ses livres ont fait l'objet de rééditions récentes, ainsi que de traductions néerlandaises, d'autres sont encore difficilement accessibles, et l'importance de son œuvre reste méconnue. »
    (Renseignements obtenus auprès de l'Association Présence d'André Baillon).
    On notera qu'André Baillon n'est pas sans avoir des points communs avec Mirbeau : enfance difficile, études chez les jésuites, liaisons malheureuses, dépressions… En 1923, année de cette lettre, après s'être lancé dans une relation compliquée et ambiguë avec sa belle‑fille de seize ans, Baillon sombre une fois de plus et est interné à la Salpêtrière. L'invitation faite à André Baillon est consécutive à la lettre (non retrouvée) que Charles Vildrac a envoyée à Marguerite Audoux, qui l'a elle‑même fait suivre à Mme Mirbeau. D'où cette lettre (même cote) d'Alice Mirbeau à Charles Vildrac, écrite le même jour que celle adressée à la romancière :
    « Cher Monsieur,
    Marguerite Audoux m'a envoyé votre lettre et l'appel pour M. Baillon est si pressant que depuis deux jours je cherche comment faire pour qu'il vienne tout de suite ici.
    J'ai trouvé. À cinquante pas de mon pavillon habitent, dans une gentille maison à eux, un ancien jardinier et sa femme très bonne cuisinière, propre et agréable. Ils ont une jolie chambre où ils reçoivent l'été un pensionnaire. M. Baillon sera très bien soigné et entre les repas il vivra à la Fondation [un groupe de mots illisible] et le moment arrivera vite où il ne sera plus seul.
    Je ferai de mon mieux pour qu'il ne s'ennuie pas.
    Dites‑moi quel jour il arrivera.
    Il pourrait prendre un train à 1h 50 gare St Lazare pour Triel, je le ferai chercher et voilà.
    Croyez, Cher Monsieur, à mes meilleurs sentiments.
    A. Octave Mirbeau »

    (Lettre due à l'aimable vigilance de Pierre Michel)

  • André Baillon - La Fondation Octave Mirbeau - Charles Vildrac - Recherche de domestiques - Huguette Garnier
Texte

[Cheverchemont], 11/4 ‑ 23

Ma chère amie,

Je ne veux pas attendre qu'un gros mal de tête soit passé, pour vous dire que j'invite avec plaisir M. André Baillon[1] à faire un séjour ici, gratuitement bien entendu, je ne reçois pas autrement.
La Fondation doit ouvrir le 1er mai : depuis quatre ans je n'ai pu obtenir que des écrivains se décident à venir tôt à la campagne et ce n'est guère qu'à la fin mai qu'il en vient quelques‑uns. Juin, juillet, août leur plaisent davantage. Je ne voudrais pas que M. Baillon fût seul, il s'ennuierait. Soyez gentille, voyez avec M. Vildrac[2], dont je me souviens très bien, à quelle époque le convalescent voudrait venir ; je m'arrangerai pour lui avoir au moins un compagnon.
Il ne faut pas prendre au sérieux cette chaleur folle : des jours froids nous sont encore réservés.
J'ai passé l'hiver toute seule pour tout faire, aucune servante ne veut rester à la campagne l'hiver. Je m'occupe de trouver « le personnel », comme on dit ; si vous pouviez me dénicher deux femmes convenables, l'une cuisinière, l'autre femme de chambre, quel service vous me rendriez !
Je vous aurais écrit les jours prochains pour vous demander si Mme Huguette garnier n'est pas de vos amies[3].
Dites vite à M. Baillon que je suis très contente de le recevoir, les déprimés n'aiment pas attendre.
Bien affectueusement, chère Amie.

Alice O. Mirbeau

[1] Voir la partie DESCRIPTION
[2] Voir la partie DESCRIPTION. Charles Vildrac [pseudonyme de Charles Messager (1882‑1971)] fonde en 1906 le groupe de l'Abbaye de Créteil avec Georges Duhamel, René Arcos et Albert Gleizes (peintre, illustrateur et théoricien cubiste, 1881-1953), groupe unanimiste proche de Jules Romains et de son appel incessant à la puissance de l'amour universel, seule issue pour résoudre le problème de la vie.
[3] Effectivement. Voir la lettre 283, non datée, de Marguerite Audoux à Huguette Garnier, journaliste au Journal, et romancière

Lieu(x) évoqué(s)Triel-sur-Seine (alors en Seine-et-Oise, actuellement dans les Yvelines)

Géolocalisation

Notice créée par Bernard-Marie Garreau Notice créée le 17/12/2017 Dernière modification le 03/05/2024